La vie sans résistance

Quand le soi s'efface, les résistances s'effondrent.

 

Qu'est-ce que le soi me direz-vous ? C'est ce sentiment ancré, chevillé au corps d'être un individu séparé, autonome, indépendant, au contrôle et en charge de sa vie. C'est une illusion. Mais le soi étant l'illusion, il ne peut se désillusionner lui-même. C'est irrémédiablement sans espoir. Le soi est l'espoir. Espoir d'une vie meilleure, espoir de l'éveil, espoir de la libération, espoir de la fin de la souffrance.

 

Dès lors, pourquoi témoigner ? A quoi bon ? Je ne sais pas. La liste de questions peut sembler sans fin. Pourquoi le ciel bleu ? Pourquoi l'oiseau fait son nid ? Pourquoi vingt-deux personnes courent après le même ballon ? Pour rien. Il n'y a pas besoin de raisons pour être. Une question apparaît. Une réponse apparaît. Et un jour, les questions peuvent cesser. Il n'y a que Ce Qui Est. Il n'y a rien en dehors de Ce Qui Est.

 

Oui, il y a apparemment un corps au centre de l'histoire, mais il n'y a pas de centre au sein de ce corps. Il n'y a personne dans la personne. Si cela est vu, par personne, alors une détente profonde s'installe. Le sentiment d'obligation, d'être contraint, s'éteint. C'est plus simple, plus authentique, plus léger. Je peux partir courir, et passer mon temps à marcher. Je peux prendre un rendez-vous et l'annuler. Je peux dire une chose et son contraire. Sans honte ni regrets. C'est totalement libre. Il n'y a plus de position à tenir. Tel un mirage ou un arc-en-ciel, la forteresse s'est volatilisée. 

 

Le plus incroyable dans l'histoire, c'est qu'il n'y a jamais eu de forteresse. Le soi n'existe pas. Ni ici, ni ailleurs. Il n'a jamais existé. Il n'a aucune réalité. Mais il peut y avoir un sentiment de manque, d'incomplétude. C'est une illusion. C'est déjà plein. C'est déjà complet. Il ne manque rien. Il n'y a besoin de rien. C'est tellement complet que ça contient le sentiment que ce n'est pas assez.

 

Cette vie sans résistance inclut les résistances. « Je n'aime pas avoir chaud. Je n'ai pas envie de déclarer mes impôts ». Mais ces résistances ne subsistent jamais bien longtemps, car elles ne sont plus tenues. Un sourire apparaît pour les dissoudre. « C'est ça qu'est ça et c'est ok ». Comme le chat attaque s'il se sent stressé, avant de se détendre l'instant d'après. Et ça n'empêche en rien une réponse d'émerger. Si j'ai froid, je mets un pull. Et si je n'ai pas de pull, je râle. Puis, ça passe. Comme une brise printanière sur le visage.

 

Ceci est le monde de la dualité. Au sein de celui-ci coexistent le réel et l'irréel, le tout et le rien, l'absolu et le relatif, la présence et l'absence. Ne cherchez pas à comprendre. C'est incompréhensible. Les mots sont vains pour décrire Ce Qui Est. Tout au mieux, ce sont des pointeurs. Et encore. Des pointeurs vers quoi puisqu'il n'y a que Ce Qui Est ? En cette impossibilité à exprimer l'indicible résident l'amour inconditionnel, la paix qui dépasse tout entendement, la joie d'être. 

 

Ainsi, puisque toute tentative de communiquer sur le sujet est vouée à l'échec, j'aurais tout aussi pu bien écrire ... miaou, miaou.

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Commentaires: 5
  • #1

    Robert (samedi, 25 juin 2022 21:53)

    Il y a une histoire zen parlant d’un disciple qui demande à son maître si les chiens peuvent connaître l’éveil.
    La réponse du maître fût la suivante : wouaf wouaf ! �

  • #2

    Caroline (vendredi, 01 juillet 2022 11:09)

    C'est un très beau texte! Certainement vide de sens!
    Il n'y a pas de vérité!

  • #3

    Marie Schöller (lundi, 05 septembre 2022 09:22)

    Quelle joie de voir ces mots posés et malgré que ce ne soit pour rien, il ya quelque chose qui se dépose, qui se détend. C’est bon.

  • #4

    Mumu (lundi, 31 octobre 2022 13:22)

    Miaou, miaou

  • #5

    Romain (dimanche, 30 avril 2023 22:52)

    ça ronronne....